La-Femme (Économie Africaine 2025 ) – Alors que le dernier palmarès des économies africaines dessine une carte du continent en mutation, la Tunisie affiche un profil singulier.
Entre une cinquième place remarquée au rang des nations les plus avancées et des signaux d’alerte sur son attractivité financière, le pays du Jasmin cherche un second souffle pour transformer son capital humain et son patrimoine en moteurs de croissance durable.
Le paysage économique africain de 2025 ne ressemble plus à celui de la décennie précédente. Si les géants extractifs et les hubs de l’Est captent souvent la lumière, le dernier rapport de la Banque Africaine de Développement (BAD) et les indices de développement humain (IDH) replacent la Tunisie au centre de l’échiquier, bien que dans une posture complexe.
Un leadership social et technologique intact
Malgré une conjoncture mondiale atone, la Tunisie maintient son rang parmi les 5 économies les plus avancées du continent en 2025. Ce classement, qui privilégie la qualité de vie, l’éducation et les infrastructures, souligne une « exception tunisienne » : un modèle qui, malgré les crises, continue de produire un capital humain de premier plan.
La Tunisie s’illustre particulièrement sur deux fronts :
- L’Innovation : 5ème économie la plus innovante d’Afrique, elle brille par son écosystème de startups et son nombre de diplômés en sciences et ingénierie.
- Les Investissements « Greenfield » : Surprise du classement 2025, la Tunisie se hisse à la 7ème place africaine pour l’accueil de nouveaux projets d’investissement, signe que ses ambitions dans les énergies renouvelables conservent une réelle force de traction.
Le Tourisme : le grand retour et la mutation nécessaire
Le secteur touristique s’impose en 2025 comme le véritable amortisseur de la crise. Avec plus de 9 millions de visiteurs enregistrés sur l’année (et une ambition portée à 11 millions), le secteur affiche une croissance de plus de 8 %.
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Les avancées : On note une progression spectaculaire du marché britannique (+44 %) et une consolidation du tourisme maghrébin. La diversification vers le tourisme culturel et écologique permet désormais d’étendre la saison jusqu’à la fin octobre, réduisant la dépendance au « tout balnéaire ».
- Les défis futurs : Pour 2026, l’enjeu sera la montée en gamme et la connectivité aérienne (notamment vers la Chine). Le défi reste de transformer ce volume en revenus en devises plus élevés pour soutenir les réserves de la Banque Centrale.
Le paradoxe de la croissance : une trajectoire « prudente »
Cependant, la macroéconomie raconte une histoire plus nuancée. Avec une croissance prévue entre 1,9 % (BAD) et 2,5 % (FMI) pour 2025, la Tunisie navigue dans une zone de basse pression comparée à la moyenne continentale.
Le pays fait face à un « effet de ciseau » budgétaire :
- Une inflation en reflux mais sensible : Située autour de 4,9 % à 5,8 % en fin d’année, elle continue de peser sur le pouvoir d’achat, notamment alimentaire.
- Une dette publique sous tension : Représentant environ 80 % du PIB, elle limite les marges de manœuvre pour les grands investissements structurants.
- L’attractivité en question : Selon le dernier rapport de la Rand Merchant Bank, la Tunisie a glissé à la 12ème place des destinations d’investissement globales en Afrique, pénalisée par la lenteur de la réforme du Code des changes.
L’enjeu de 2026 : Le pivot vers la modernisation
Pour les analystes, le salut réside dans trois ruptures d’ici 2026. La première est énergétique : la signature de projets photovoltaïques de 500 MW (à Gafsa, Sidi Bouzid et Gabès) vise à réduire la facture de gaz naturel de 125 millions de dollars par an. La seconde est institutionnelle : la simplification des procédures administratives pour libérer les exportations de services numériques.
Enfin, la stabilité sociale reste le socle du modèle. En restant dans le Top 5 du « mieux vivre » en Afrique, la Tunisie peut attirer les talents régionaux, à condition de freiner l’exode de ses propres cadres : plus de 45 000 ingénieurs ont déjà quitté le pays, représentant une perte d’investissement formation colossale.
L’œil de l’expert : « La Tunisie ne manque pas de moteurs — entre son tourisme record et son industrie verte naissante — elle manque de fluidité financière. Son positionnement sur la haute technologie et le verdissement de sa production sont ses meilleurs atouts pour réintégrer le Top 10 des puissances les plus dynamiques d’ici 2030. »






























